Accéder au contenu principal

le gardien de l'Art







C’est pas gai un centre d’art en août !




Peu de réflexions sont aussi pertinentes que celle ci…
Un couple de vieux touristes fatigués par la chaleur de la ville et la durée de leur mariage
va, trottinant d’un tableau à l’autre. Parfois, ils me prennent à témoin du délire de l’artiste,
et alors, je hoche la tête d’un air entendu.
Il y a le maniaque en short, celui qui photographie tout après la pénible recherche de l’angle parfait. Pour que le paysage soit complet, voici le couple avec enfants : deux mômes, otages culturels et futurs délinquants en col blanc. Avec ceux là, c’est l’enfer, toujours être à l’affut de la main qui touche l’œuvre, de la crotte de nez fatale…l’enfer !

Parfois, bien que ce soit formellement interdit, je réponds à un touriste, et je ressort les explications que sa seigneurie « la médiatrice » a bien voulu délivrer au bas peuple esbaubi par tant de savoir…bêcheuse…et donc je m’élève dans la micro-société du lieu en usurpant ses bribes de savoir. Mais en douce, car je tiens à ma place, non qu’elle soit mirifique, mais elle me permet le confort d’une vie « planquée ».

Chez moi, c’est du domaine de la survie, car je me suis « sorti » de la lutte ambiante, j’ai juste dit « Pouce, je ne joue plus ! ».

Dans un monde parallèle, j’ai été artiste, assez renommé, gagnant bien ma vie sur un malentendu de départ, et moyennant quelques compromis. J’ai créé un style, qui est devenu l’emblème artistique de mon époque, et puis par glissements progressifs, ce motif est devenu un élément de décor, du design…j’ai déposé la marque, et mon compte en banque a suivi la courbe inverse de ma créativité. Je fus un homme apparemment heureux mais horriblement creux !

O putain, ce sale con vient de laisser tomber ce kleenex !
Monsieur, s’il vous plait, vous avez perdu quelque chose…oui, ça…vous avez une poubelle, là bas !

L’atelier pour les gamins va commencer…Ca me plaît…la plupart sont chouettes et spontanés…pas comme l’intervenante qui est compassée et directive, mais bon, c’est quand même un bon moment !

OOO merde, le directeur va me gonfler avec ses consignes paranoïaques et récurrentes…oui, monsieur le directeur je pense bien aux sacs, oui je leur fais prendre à la main…oui et bien sûr, on leur dit pour les boissons…oui, de sortir, c’est ca !

J’en ai marre de ce type qui a appris un art dogmatique et figé ; putain, de l’air…vite !

Merde, cet ectoplasme m’a fait louper le début de l’atelier…





20 ans plus tard…

Karim est une vraie star, il expose dans le monde entier, ses œuvres sont foisonnantes et à chaque exposition il surprend et étonne critiques et amateurs d’art en montrant des œuvres holographiques toujours différentes et d’une inspiration toujours renouvelée.

Un soir, il est l’invité vedette d’une émission culturelle mais diffusée avant 23 heures. Le jeune artiste répond à des questions pressantes sur sa créativité…poussé à ses limites par un bon journaliste il parle pour la première fois d’un homme qui lui a appris non seulement des techniques de peinture mais qui, surtout, lui a fait rentrer au « marteau piqueur » une éthique de la créativité comme seule valeur…cet homme était un gardien de salle dans le centre d’art qu’il avait un jour visité avec le centre social de son quartier…un de ces hasards de la vie !


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Une nouvelle série: L'aventure du "BEAU" ou "pourquoi l'Art contemporain c'est moche!"

  L'aventure du "Beau"    Comme pour tous ces mots "valise": Art, Culture, le mot "Beau" est miné dès le départ car tout le monde croit en connaître "vaguement" le contenu, ce qui signifie que personne ne le connaît vraiment. Ce paradoxe explique l'incompréhension et le désarroi qui accompagnent la découverte d'un Art qui s'est éloigné de la vague notion que l'école, nos parents, et nos expériences (heureuses et malheureuses) nous ont transmis. Partie 1 Ceux qui me connaissent déjà savent comment je procède avec ces notions d’art : comme un peintre, par petites touches…et comme un peintre je reviens souvent sur ma toile. Tout cela pour vous dire de ne pas vous offusquer de mes « répétitions », c’est voulu.   Le cours, appelons ces moments un cours ; ce cours donc va se dérouler en plusieurs phases :   L’acquisition de notions théoriques, ensuite il va s’agir de mettre ces notions dans un contexte réel, en essayant d’intég...

Comment créer son café littéraire?

D'abord pourquoi vouloir créer un café littéraire? C'est pour associer culture et convivialité. Discuter lecture, livres, auteurs, tout en sirotant une boisson fraîche ou tout en dégustant un café ou un chocolat permet de mettre à distance toute velléité de jugement et de simplement associer le plaisir de lire à celui de la boisson partagée. Faut-il obligatoirement avoir un statut commercial? Si c'est la seule raison sociale du lieu, oui, il faut s'organiser sur la base d'un commerce et comme tel, être enregistré au registre du commerce...si l'objectif est de dégager aussi un ou plusieurs salaires! Si c'est dans un but de rassemblement associatif et/ou d'animation d'un lieu ou d'un quartier, alors il faut que ce "café littéraire" soit mentionné dans l'objet social ou les actions liées à l'objet social. C'est dans ce cadre qu'un tel café peut exister dans une bibliothèque ou autre lieu culturel associatif. ...

Exposer des livres d'artistes...une solution pour une médiathèque

Bien sûr  il faudrait d'abord définir le livre d'artiste: vaste entreprise...entre les livres d'art, les livres illustrés et les livres de poésie et d'artiste...il y a de nombreuses éventualités. Non, soyons exigeants, je vous parle là, de véritables petites oeuvres d'art, où l'ensemble livre et contenu est comme un installation plasticienne. Dans chaque région, il existe des artistes qui réalisent de telles oeuvres, à vous de trouver ces petits incunables. Une fois oeuvres et artistes trouvés, à votre charge de les mettre en valeur. Un bel éclairage ne gâche rien, et une vitrine peut éviter bien des déboires.  Ensuite il faut apporter une médiation à votre exposition. Souvent il vaut mieux éviter l'artiste, lui même, ou alors se contenter de lui faire lire ou décrire des passages. Il faudra trouver une personne experte qui fera une exégèse de ces livres d'artistes.   A peu de frais, vous pouvez ainsi proposer une exposition de qualité, p...